La pratique pétitionnaire des Amérindiens de la vallée du Saint-Laurent sous le Régime britannique : pouvoir, représentation et légitimité (1760-1860)

Gohier, Maxime (2014). « La pratique pétitionnaire des Amérindiens de la vallée du Saint-Laurent sous le Régime britannique : pouvoir, représentation et légitimité (1760-1860) » Thèse. Montréal (Québec, Canada), Université du Québec à Montréal, Doctorat en histoire.

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Résumé

À partir de la dernière décennie du XVIIIe siècle, les Amérindiens de la vallée du Saint-Laurent ont eu recours à la pratique pétitionnaire pour faire va loir leurs revendications auprès des autorités coloniales. Cette thèse étudie les circonstances entourant l'adoption, par les communautés autochtones, de ce mode de communication politique d'origine britannique, ainsi que ses modalités particulières d'utilisation par les Amérindiens. Contrairement à la plupart des études récentes, qui recourent aux pétitions surtout pour documenter l'historique des revendications autochtones, la thèse propose une analyse globale de la pratique, en s'intéressant à toutes les requêtes, indistinctement des sujets abordés, des communautés qui les ont produites ou des autorités sollicitées. Cette approche, qui voit dans la pétition un véritable rituel politique, vise à mettre en lumière le rôle joué par cette pratique dans la transformation des structures politiques des communautés amérindiennes au XIXe siècle ainsi que de leur rapport à la société coloniale. La thèse souligne notamment l'importance de la pratique dans le processus de mise en tutelle des Amérindiens par l'État, qui a abouti à l'adoption des premières lois sur les Indiens au milieu du XIXe siècle. Les nombreuses requêtes présentées par les communautés amérindiennes aux autorités coloniales ont en effet contribué à établir une relation dans laquelle l'État était non seulement légitimé, mais avait même le devoir d'intervenir dans les affaires locales des communautés amérindiennes. L'analyse, centrée sur la culture politique, permet de mieux comprendre ce processus en mettant en lumière les luttes et les relations de pouvoir que cristallisait la pratique pétitionnaire amérindienne, selon les différents contextes politiques au sein desquels elle s'intégrait : soit l'Empire britannique, l'État colonial et la communauté autochtone villageoise. La pratique pétitionnaire amérindienne constitue notamment une excellente occasion d'analyser le rôle des Amérindiens dans le processus de formation de l'État colonial britannique en Amérique. Adoptée par les Canadiens dès le lendemain de la Conquête, la pétition ne s'est imposée dans les communautés amérindiennes de la vallée du Saint-Laurent qu'au lendemain de l'indépendance des treize colonies américaines et de l'adoption par Londres de l'Acte constitutionnel de 1791. À la lumière de la transformation des modes de gouvernance de l'Empire britannique durant la seconde moitié du XVIIIe siècle, la transition des rituels diplomatiques autochtones vers la pratique pétitionnaire apparaît comme le résultat d'une croissance importante du pouvoir exercé par l'État colonial, via le département des Affaires indiennes, dans la vie quotidienne des communautés amérindiennes. Une telle analyse de la relation entre les Amérindiens et l'État, centrée sur les pratiques plutôt que sur les discours officiels, permet de remettre en question l'interprétation traditionnelle de la politique indienne, qui voit dans la fin des guerres coloniales la cause immédiate du changement de statut des Amérindiens vis-à-vis de l'État. La thèse étudie aussi le processus de préparation des pétitions et souligne comment le discours véhiculé par ces documents, qui représentait les Amérindiens comme des individus pauvres, ignorants et dépendants de l'intervention étatique, répondait davantage aux besoins d'individus qui cherchaient à exercer leur pouvoir sur les Amérindiens et sur leurs biens qu'à la réalité quotidienne de ces derniers. De tels discours servaient à légitimer la mainmise qu'exerçaient (ou que cherchaient à exercer) les missionnaires, les agents des Affaires indiennes ou des notaires sur la gestion des Affaires indiennes et répondaient essentiellement aux nouveaux paradigmes de l'État libéral, dont la logique d'intervention reposait sur la prise en charge de la pauvreté et de la déviance. Finalement, la thèse étudie comment la pratique pétitionnaire s'est intégrée aux luttes politiques internes des communautés et comment elle a contribué à en transformer les enjeux. Bien qu'on connaisse encore mal la dynamique politique des communautés amérindiennes au début du XIXe siècle, la pétition nous permet à tout le moins de voir à l'œuvre un processus de transformation dans la nature du pouvoir des chefs, qui en plus de leur rôle de représentants de leurs communautés, sont devenus aussi des gestionnaires de fonds publics. Cette transformation a largement influencé l'utilisation que les Amérindiens ont faite de la pratique pétitionnaire, qui s'est imposé rapidement comme un privilège des chefs et comme un moyen d'asseoir la légitimité de leur autorité à la fois vis-à-vis de l'État et au sein même de leurs communautés. En revanche, l'adoption de cette pratique a aussi créé des opportunités pour l'émergence de nouvelles formes de contestation du pouvoir, qui ont abouti à la remise en cause du système politique autochtone traditionnel. C'est de cette nouvelle dynamique d'opposition, qui prenait à témoin les autorités coloniales, qu'ont émergé les premières lois sur les Indiens, afin d'accorder une reconnaissance légale aux institutions politiques autochtones. En ce sens, la pratique pétitionnaire a joué un rôle fondamental dans la survie politique des communautés amérindiennes au XIXe siècle, mais aussi dans le processus ayant conduit à leur mise en tutelle. ______________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : Amérindiens, État, pratique pétitionnaire, Bas-Canada, communication politique, représentation, politique indienne, XVIIIe siècle, XIXe siècle.

Type: Thèse ou essai doctoral accepté
Informations complémentaires: La thèse a été numérisée telle que transmise par l'auteur.
Directeur de thèse: Beaulieu, Alain
Mots-clés ou Sujets: Amérindien, Colonie britannique, Communication politique, Histoire, Légitimité politique, Pétition, Politique coloniale, Pouvoir politique, Régime anglais (1763-1867), Relation avec l'État, Revendication autochtone, Vallée du Saint-Laurent
Unité d'appartenance: Faculté des sciences humaines > Département d'histoire
Déposé par: Service des bibliothèques
Date de dépôt: 22 déc. 2014 14:22
Dernière modification: 22 déc. 2014 14:22
Adresse URL : http://archipel.uqam.ca/id/eprint/6534

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