Entre l'advenu et le devenir, la vie suite au génocide : vers une compréhension dynamique de l'expérience d'hommes rwandais

Bourgeois-Guérin, Élise (2012). « Entre l'advenu et le devenir, la vie suite au génocide : vers une compréhension dynamique de l'expérience d'hommes rwandais » Thèse. Montréal (Québec, Canada), Université du Québec à Montréal, Doctorat en psychologie.

Fichier(s) associé(s) à ce document :
[img]
Prévisualisation
PDF
Télécharger (24MB)

Résumé

Cette recherche qualitative porte sur l'expérience de vie d'hommes rwandais ayant été exposés, directement ou indirectement, à la violence du génocide des Tutsi au Rwanda. Elle offre ceci d'original qu'elle met en lumière la pluralité des effets du génocide dans la vie des sujets à partir d'une compréhension qui ne relève pas uniquement du vocabulaire de la pathologie. De nombreuses recherches recensent les conséquences débilitantes associées au vécu de la violence organisée. Cependant, rares sont les écrits qui s'attardent aux significations individuelles et collectives qui entourent le traumatisme tout comme peu d'études se penchent sur les efforts déployés par les sujets pour composer avec une telle expérience. Dans le cas précis du génocide des Tutsi au Rwanda, les initiatives documentées témoignent fréquemment de la mobilisation des femmes. Les moyens sur lesquels les hommes, eux, s'appuient pour continuer à vivre suite au génocide demeurent beaucoup moins connus. Notre thèse se fonde sur le discours d'hommes rwandais et s'articule autour de trois grands objectifs : sonder les processus individuels ou collectifs via lesquels ces sujets arrivent (ou non) à construire du sens autour de leur expérience du génocide; mettre en évidence les moyens qu'ils utilisent pour faire face à cette expérience et finalement, explorer la place et le rôle de la parole et du silence dans leur discours portant sur l'expérience du génocide. Neuf hommes adultes rwandais habitant au Québec ont été invités à participer, à deux reprises chacun, à des entretiens semi-directifs. Totalisant plus de 30 heures d'entrevues, le verbatim de ces dix-huit entretiens a été soumis à une analyse de discours en trois temps (thématique, par tableau synthèse et dynamique). La méthodologie qualitative de cette recherche s'est inspirée de l'approche psychodynamique. Nous nous sommes ainsi attardée aux contenus manifestes et latents du discours des sujets mais également à leur contexte d'énonciation: celui d'une rencontre intersubjective entre sujet et chercheur. Notre analyse met en relief la difficulté qu'éprouvent les participants à s'expliquer le génocide. Cette difficulté ne semble cependant pas bloquer l'effort de pensée des sujets qui, s'ils ne trouvent pas de réponses satisfaisantes au pourquoi du génocide, n'en continuent pas moins de chercher. Pour plusieurs sujets ayant été sur place lors du génocide, leur survie même est le fruit du hasard. Lorsque saisie dans l'horizon du don et de la dette, cette vie reçue pourrait représenter une forme de don à la fois précieux et accablant impliquant une certaine réciprocité. Une part des aménagements de vie des participants suite au génocide peuvent ainsi être lus dans une optique de retour du don. Les sujets ont recours à une diversité de moyens pour composer avec l'expérience du génocide tels que l'aide apportée à d'autres victimes, le raccrochage à certains éléments de la vie active, la mobilisation autour d'un devoir de transmission et la recherche de support auprès de membres de la communauté. Il appert que la valence structurante de ces moyens ne soit pas absolue mais plutôt tributaire du mouvement par lequel les sujets arrivent à se distancier de l'horreur tout en parvenant à en assimiler certains contenus. Finalement, la parole de l'intime se fait effacée dans le discours des sujets au profit d'une parole politique qui se rallie à une identité collective et cherche à promouvoir la mémoire du génocide dans l'espace public. L'emprunt d'une telle parole pourrait notamment viser à rétablir un lien social mis à mal par le génocide. En conclusion, la complexité et la mouvance des rapports que les sujets entretiennent face à leur expérience du génocide interrogent le statisme des modèles normatifs qui ramènent la conception du traumatisme à la présence de symptômes préétablis. Notre analyse souligne la pertinence d'un travail clinique qui ne se fixe pas uniquement sur la recherche de sens mais qui admet aussi la part d'absurdité sur laquelle s'ouvre l'expérience du génocide. Cette thèse met aussi en lumière le décalage qui s'opère entre le dévoilement de l'intime prescrit par certaines approches cliniques centrées sur le traumatisme et la parole politique que les sujets privilégient. Finalement, la prégnance des initiatives que les sujets mettent en œuvre dans l'espace public réaffirme l'importance de reconnaitre le pouvoir thérapeutique non seulement dans l'espace privé de la clinique mais également dans l'espace social. ______________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : Génocide, Rwanda, Hommes, Parole, Aménagements de vie, Construction de sens, Survie, Traumatisme, Psychologie

Type: Thèse ou essai doctoral accepté
Informations complémentaires: La thèse a été numérisée telle que transmise par l'auteur
Directeur de thèse: Letendre, Robert
Mots-clés ou Sujets: Aspect psychologique, Génocide rwandais (1994), Homme, Parole, Rwandais, Signification (Psychologie), Survivant, Témoignage, Traumatisme psychique, Rwanda
Unité d'appartenance: Faculté des sciences humaines > Département de psychologie
Déposé par: Service des bibliothèques
Date de dépôt: 04 janv. 2013 13:09
Dernière modification: 01 nov. 2014 02:24
Adresse URL : http://archipel.uqam.ca/id/eprint/5127

Statistiques

Voir les statistiques sur cinq ans...