Lambert, Christelle
(2022).
« Bilan hydrique et apport d'eau souterraine aux tourbières du Moyen-Nord québécois (Canada) dans les conditions actuelles et en conditions de changements climatiques » Mémoire.
Montréal (Québec, Canada), Université du Québec à Montréal, Maîtrise en sciences de la Terre.
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Résumé
Les contextes géologiques, topographiques, hydrologiques et climatiques dans lesquels se produisent les apports d’eau souterraine dans les tourbières du Moyen-Nord québécois et l’importance de ces apports dans le bilan hydrique de ces tourbières sont encore très peu étudiés. Les deux tourbières étudiées dans ce projet (Misask et Cheinu) sont considérées représentatives des écosystèmes de cette région du Québec. Il s’agit de tourbières structurées de type minérotrophe pauvre montrant une récente ombrotrophisation dans leurs zones centrales profondes. Elles se sont développées dans les dépressions topographiques drumlinoïdes et morainiques du till sablo-silteux composant le substrat géologique régional. Les objectifs de cette recherche étaient de 1) quantifier le bilan hydrique actuel de deux tourbières du Moyen-Nord du Québec, 2) déterminer si l'afflux d'eau souterraine est une contribution importante à leur bilan hydrique et documenter leur sensibilité aux changements de recharge. Les campagnes de terrain (essais hydrauliques in situ, carottage de tourbe, levés topographiques détaillés, suivis horaires des niveaux de nappe, mesures de débits) ont permis de caractériser la géomorphologie du bassin tourbeux, les propriétés hydriques des dépôts organiques et des sédiments composant l’aquifère superficiel environnant, ainsi que la dynamique hydrologique de la nappe phréatique leur étant associée. Un modèle numérique tridimensionnel (MODFLOW) en régime permanent simulant adéquatement les conditions hydrogéologiques actuelles a permis de quantifier le bilan hydrique de chaque tourbière. Une analyse de sensibilité des niveaux et des flux à la recharge a fourni des données permettant d’estimer la vulnérabilité des deux tourbières aux changements climatiques. Au site de la tourbière Misask, les flux entrants sont dominés par la recharge (78 %) tandis que la contribution de l’eau souterraine n’est que de 22%. Les flux sortants de la tourbière sont évacués principalement par ruissellement de surface (85 %) et dans une moindre mesure par une contribution de la tourbière à l’aquifère superficiel (15 %). Le site de la tourbière Cheinu montre un bilan hydrique dont les flux entrants sont dominés par les apports en eau souterraine (56 %) et, dans une proportion presque égale, par la recharge (44 %). Ces débits sont exfiltrés principalement par le ruissellement superficiel (74 %), et par des flux souterrains de la tourbière vers l’aquifère (26 %). Enfin, les modèles numériques furent soumis à des changements de recharge (-50%, -20% et +20%) afin de simuler les effets hydrogéologiques potentiels des changements climatiques. Dans les deux sites, les variations de niveau de nappe moyenne sont plus faibles dans les dépôts organiques que dans l’aquifère environnant. Les charges hydrauliques moyennes ont varié de -1 à +0,3 cm pour la tourbière Misask et de -9 à +2 cm pour la tourbière Cheinu. De plus, sur le site Misask, les échanges de flux avec l’aquifère ont montré une sensibilité limitée à la recharge (-50, -20 et +20%) avec des variations de -26, -8 et +7% des flux provenant de l’aquifère et de -27, -9 et +7 % pour les flux exfiltrés de la tourbière. Le ruissellement de surface montre une plus grande sensibilité aux changements de recharge, avec une variation de -48, -19 et +19% respectivement pour les trois scénarios. Sur le site de Cheinu, les scénarios de recharge ont généré des changements de flux d’eau souterraine plus importants qu'au site Misask. Ceux-ci ont engendré des variations de -33, -12 % et +11 % des flux entrants et de -44, -17 et +17 % des flux sortants dans la tourbière. Le ruissellement de surface a montré des variations de -39, -15 et +15%. Les scénarios étudiés ayant engendré des effets différents sur les deux sites, montrent que la sensibilité des tourbières aux changements climatiques est complexe et provient des facteurs intrinsèques distinguant les deux tourbières étudiées (morphologie du bassin tourbeux, contribution des échanges aquifère-tourbière au bilan hydrique, gradient topographique). Dans le cadre de futurs travaux, l’identification de ces facteurs pourrait permettre de faciliter la compréhension et l’estimation de leur vulnérabilité grâce à des méthodes de classification applicable à l’échelle régionale.
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MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : eau souterraine, bilan hydrique, tourbière, Moyen-Nord québécois, modélisation hydrogéologique, MODFLOW, régime permanent, changement climatique