Lamontagne, Marjolaine
(2020).
« La pratique (para)diplomatique de la souveraineté et les nations non souveraines dans les organisations multilatérales : le cas de la Flandre au conseil de l'Union européenne » Mémoire.
Montréal (Québec, Canada), Université du Québec à Montréal, Maîtrise en science politique.
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Résumé
Au fondement de la souveraineté territoriale se trouve la revendictation, par les représentants de l’État souverain, d’un pouvoir symbolique – d’une autorité suprême – dans le domaine de
la représentation et de la gouvernance internationales. Elle s’incarne ainsi dans des pratiques diplomatiques « doxiques » ayant pour effet de produire et de reproduire l’unité externe de
l’État souverain, et repose sur un savoir pratique ou un « sens commun » partagé par une majorité d’agents étatiques et internationaux. À l’ère de la mondialisation, les représentants de
gouvernements fédérés ou régionaux « non souverains » sont de plus en plus nombreux à réclamer le droit d’exercer de manière autonome leurs compétences constitutionnelles à l’étranger et, notamment, d’intervenir auprès des organisations multilatérales où sont tenus les « grands débats » de la politique mondiale; ce faisant, ils remettent en cause l’unité de juridiction et l’unité « nationale » – l’identité nationale et les intérêts qui en découlent – de leur
État central. Cette revendication, « subversive » au sens où elle transcende la dichotomie centralisation/sécession, engendre alors une lutte interactive autour du pouvoir symbolique de l’État et génère de la résistance, voire un déni de reconnaissance, de la part des agents
souverains et des fonctionnaires multilatéraux. Ce mémoire propose une double contribution, théorique et empirique. Sur le plan théorique, il effectue une synthèse des « théories de la
pratiques » en sociologie des Relations internationales avec les littératures fédérale et nationale de la paradiplomatie, afin de développer un cadre d’analyse original pour l’étude du phénomène paradiplomatique dans sa phase la plus politiquement avancée, soit sa variante nationaliste – la paradiplomatie identitaire. Sur le plan empirique, ce mémoire entend combler certains angles morts persistant dans les littératures sur la paradiplomatie et la gouvernance « à paliers multiples » au sein de l’Union européenne, en fixant la lorgnette analytique sur le déroulement concret de la paradiplomatie en contexte multilatéral européen, de même que sur les représentants régionaux qui la mettent en pratique. Se fondant sur une quinzaine d’entretiens avec des représentants des gouvernements flamand et belge au Conseil de l’UE, il présente une analyse rigoureuse et à jour de la pratique de la paradiplomatie identitaire flamande telle qu’elle s’est opérée entre 2011 et 2019. Il s’avère que celle-ci est confrontée, dans sa mise en pratique, aux tendances centralisatrices et hiérarchiques des diplomaties souveraines dans l’UE, ainsi qu’au pouvoir symbolique des représentants fédéraux belges et étrangers. Tant la lutte contre l’effacement symbolique de la « nation culturelle » flamande que la défense des intérêts distinctifs de la Flandre doivent par conséquent être menées, aussi bien dans les contextes diplomatiques formels qu’informels, par le truchement de la voie/x souveraine de la Belgique.
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MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : paradiplomatie identitaire, diplomatie multilatérale, théories de la pratique, souveraineté territoriale, fédéralisme, nation et nationalisme « non souverains », Flandre,
Belgique, Conseil de l’Union européenne