Lénart, automne
(2024).
« The gay crime of "spending time" : cruising, criminalization, and the circumvention of provincial charter protections at the Chutes Sainte-Marguerite » Mémoire.
Montréal (Québec, Canada), Université du Québec à Montréal, Maîtrise en science politique.
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Résumé
Au Québec, les opérations policières ciblant des lieux de rencontre queers et ayant pour but la punition des comportements dits « indécents » restent monnaie courante. Malgré l'égalité juridique formelle (1977) et l'assurance que les relations intimes queers sont depuis longtemps décriminalisées, les interventions anti-queers étatiques persistent aujourd’hui sous la forme d'opérations contre les « actions indécentes ». Pour comprendre comment l'égalité juridique formelle coexiste avec la punition et la criminalisation continue de l’érotisme et des intimités queers, je porte mon attention sur les développements récents aux Chutes Sainte-Marguerite, un lieu de rencontre et de nudisme queer situé en territoire non cédé Anishinabewaki et Omàmìwininìwag (Algonquin) sur les rives densément boisées de la rivière du Nord, à Sainte-Adèle, au Québec. Prenant comme point de départ l'affirmation de Grönfors et Stalström (1987) selon laquelle « le contrôle de la sexualité et du comportement sexuel [...] est plus souvent caché derrière d'autres questions, reçoit d'autres noms, etc., jusqu'à ce qu'il soit parfois difficile de découvrir que ce qui est contrôlé est le comportement sexuel » [traduction] (p. 54), j'émets l'hypothèse que les distinctions analogues, la désinformation, le cover storying, ainsi que les notions de « loi », de « sécurité » et d’« égalité » favorisent la coexistence harmonieuse de ces deux phénomènes. En m'interrogeant sur la façon que les distinctions analogues, la désinformation, le cover storying, la « loi », la « sécurité » et l’« égalité » favorisent cette coexistence, je me pose la question suivante : comment l'État a-t-il tenté d'imposer un comportement hétéronormatif aux Chutes sans déclencher les protections antidiscrimination prévues par la Charte des droits et libertés de la personne? Je soutiens que l'État a tenté de faire ceci, en premier lieu, en s'éloignant des motifs de discrimination juridiquement prohibés — ceux qui concernent l'identité sexuelle (homo/hétéro) — et en s'appuyant de plus en plus sur des motifs de discrimination juridiquement protégés — ceux qui concernent l'espace et son utilisation (usage queer/hétéronormatif). Je soutiens en outre que les campagnes de désinformation et de cover storying ont grandement facilité ce changement, masquant la substitution et, ce faisant, désactivant (temporairement et dans la mesure du possible) les protections de la Charte garantissant aux minorités sexuelles l'accès à l'espace public. Je soutiens, dans un deuxième temps, que cette désactivation a été rendue possible par les opérations d'obscurcissement de notions telles que la « loi » et la « sécurité », ainsi que par le déploiement d'une notion d' « égalité » considérablement affaiblie, que je nomme « égalité punitive ». En résumé, je soutiens que les distinctions analogues, la désinformation, le cover storying, la « loi », la « sécurité » et l’ « égalité » constituent des dispositifs punitifs au moyen desquels l'État désactive les protections de la Charte et hétérosexualise l’espace public.
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MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : cruising, police, technologies de pouvoir hétérosexistes, criminologie anarchiste et abolitionniste, accès à l'information, Sainte-Adèle, histoire des Laurentides