Houde, Geneviève
(2022).
« Le désir en question : de la psychanalyse aux philosophies de la communauté » Thèse.
Montréal (Québec, Canada), Université du Québec à Montréal, Doctorat en psychologie (Essai doctoral).
Fichier(s) associé(s) à ce document :
Résumé
Cette contribution vise à penser le lien social avec la psychanalyse. Plus particulièrement, à circonscrire les enjeux que rencontre le désir dans nos sociétés hypermodernes, caractérisées par une fermeture de l’horizon qui a pour corrélat la marchandisation de l’existence. En dépit du fait que les propositions relatives à la sublimation (Freud), au langage (Lacan) et autour du jeu (Winnicott) concernent l’espace culturel de même qu’elles s’y logent, les philosophies de la communauté peuvent nous aider à accentuer le traitement du rapport social dans le champ de la psychanalyse, prémunissant d’un abord de l’inconscient entendu dans un sens intrapsychique. La communauté entendue comme désir de même que l’inconscient adviendraient par suite d’une double perte : la perte de l’Universel, puis la perte de la croyance en la toute-puissance de l’individu, ce qui correspond à un passage de l’immanence à une réintroduction de la transcendance. La mise en évidence de l’inconscient par Freud avait fait vaciller la position de maîtrise de l’homme : le décentrement opéré par l’introduction de l’inconscient signifie qu’il existe une dimension de l’être qui excède la conscience, mais peut-être surtout qui excède la volonté. De même la communauté est le fait d’un décentrement en ce qu’elle exclut toute maîtrise, qui concerne tout autant le rapport que l’homme entretien avec lui-même qu’avec l’autre. Dans cette perspective, l’homme ne peut être abordé sans considération pour ce qui constitue pour lui des « circuits de dépendance » (Stiegler, 2010) : il est donc irréductible à l’individu. Cependant, la communauté, telle que l’ont pensée Maurice Blanchot et Jean-Luc Nancy, ne réfère pas à un ensemble d’individus réunis, mais plutôt à une possibilité toujours engagée d’une manière ou d’une autre dans son impossibilité. Une mise en relief de l’appropriation est ce qui m’a conduit à mettre en tension, tout au long de cette recherche, possession et infini. Cette mise en tension, je l’ai traitée d’abord en exposant une critique de l’individu comme effet de la modernité, qui, pour Arendt (2002), se présente comme autonome et abandonné ; de même qu’avec Bataille, qui est le premier à thématiser la communauté, l’individu - comme figure d'autosuffisance sur lequel la modernité et les sciences positives s’étaient établies -, est re-questionné, laissant place à la perspective du lien, qui n’aboli en rien le vertige de la singularité. Vertige qui se traduit dans sa pensée par un traitement de l’expérience de l’excès. Puis, j’ai discuté de quelles manières le rapport éthique pour Levinas s’inscrit en opposition au rapport de possession, en ce qu’il cherche à circonscrire une forme spécifique de socialité (utopique) dont le noyau est l’impossibilité d’abolir le mystère de l’autre. La relation à autrui dans la relation éthique par Levinas m’est apparu converger avec ce que Nancy, Bataille et Blanchot ont pensé comme communauté, en ce qu’elles caractérisent l’une comme l’autre un rapport à l’autre qui engage, tout à la fois, l’amour infini et le maintien de la distance. Par suite, j’ai discuté la thèse selon laquelle la communauté ne serait pensable que comme négativité, à savoir que la communauté n’est pas réductible à un lien entre deux individus : elle se rapporte nécessairement à une résistance. Résistance à la commercialisation de la vie, cette dernière ayant pour corrélat la mise hors circuit de ce qui pourrait potentiellement se présenter comme un « autrement ». Pour finir, j’ai exposé la proposition de Bernard Stiegler selon laquelle la destruction du désir associée à une perte du sentiment d’exister est à l’œuvre dans les sociétés hypermodernes. Et si, pour Stiegler, la sublimation est la condition sine qua non du lien social, qu’elle agit comme un antidote à l’obsolescence des objets, c’est par son arrimage à l’infini. La sublimation est, en définitive, une forme d’ascèse. De même, paradoxalement à ce que suggère sa nomination qui évoque le commun et ouvre à l’imaginaire des grands rassemblements joyeux, l’exigence de la communauté renvoie à l’ascèse. Car la communauté a pour exigence de se situer en marge de la totalité alors que c’est en direction de cette même totalité que le désir conduit. Cependant, cette manière de penser l’exigence de la communauté – trop collée à un modèle de suffisance, – paraît impropre à en cerner le sens véritable. Car l’ascèse qu’engage la communauté est davantage un renoncement à l’illusion d’une toute puissance – à se croire soi-seul, contenir la totalité – qu’un renoncement à l’autre. Le désir de l’autre (ou vers l’autre) étant caractérisé par une soif, par principe, impossible à assouvir, tandis que son inachèvement ne nécessite nullement une mise à l’écart de l’autre.
_____________________________________________________________________________
MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : Communauté, psychanalyse, philosophie, désir, altérité, relation éthique, absence, utopie, sublimation.
Type: |
Thèse ou essai doctoral accepté
|
Informations complémentaires: |
Fichier numérique reçu et enrichi en format PDF/A. |
Directeur de thèse: |
Thiboutot, Christian |
Mots-clés ou Sujets: |
Désir / Psychanalyse / Communauté / Philosophie / Altérité / Lien social / Individu et société |
Unité d'appartenance: |
Faculté des sciences humaines > Département de psychologie |
Déposé par: |
Service des bibliothèques
|
Date de dépôt: |
12 avr. 2023 08:15 |
Dernière modification: |
12 avr. 2023 08:15 |
Adresse URL : |
http://archipel.uqam.ca/id/eprint/16468 |