Boivin, Noémie
(2018).
« Dénationalisation massive de Dominicains d'ascendance haïtienne en République dominicaine : acte d'apartheid au regard du droit international des humains ? » Mémoire.
Montréal (Québec, Canada), Université du Québec à Montréal, Maîtrise en droit.
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Résumé
La discrimination raciale à l’encontre des personnes d’ascendance haïtienne en
République dominicaine a été reconnue comme systématique par différents observateurs.
Nous considérons que la manipulation du droit à une nationalité est au cœur de la reproduction de cette discrimination raciale. Si, depuis la réforme de la loi sur la migration, en 2004, plusieurs mesures adoptées par l’État dominicain ont eu pour effet de poser, aux personnes d’ascendance haïtienne, des obstacles à l’acquisition et au maintien de la nationalité dominicaine, le contexte historique de racisme institutionnalisé le fait depuis des décennies. C’est en 2013 que ces limitations ont été entérinées par une décision du Tribunal constitutionnel dominicain, la Sentencia TC/0168/13, qui a eu pour effet de priver plus de 200 000 Dominicains d’ascendance haïtienne du droit à la nationalité dominicaine et de consacrer juridiquement la discrimination raciale à leur endroit. Nous cherchons à savoir si la dénationalisation judiciaire des Dominicains d’ascendance haïtienne, par cette décision, constitue une forme d’oppression raciale sanctionnée par l’État au regard du droit international. Nous adoptons une méthodologie sociologique du droit et nous inspirons des auteurs associés à la Critical Race Theory. Cette démarche nous permettra de prendre en considération le contexte de racisme institutionnalisé dans notre double analyse du droit dominicain en matière de nationalité et du droit international des droits humains en matière de discrimination raciale. Nous soutenons que les personnes d’ascendance haïtienne constituent un groupe racisé en République dominicaine et que leur domination et leur oppression systématique, caractérisées au niveau social par l’antihaïtianisme dominicain, sont formalisées par des mesures adoptées depuis 2004 par l’État dominicain. Nous concluons que l’exclusion citoyenne résultant de la dénationalisation judiciaire des Dominicains d’ascendance haïtienne peut être assimilable à l’exclusion citoyenne telle que pratiquée dans le cadre d’un système d’apartheid.
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MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : nationalité, antihaïtianisme, apartheid, Critical Race Theory, République dominicaine