Utilisation du milieu boréal par l'ours noir et implications pour la conservation du caribou de la Gaspésie

Mosnier, Arnaud (2008). « Utilisation du milieu boréal par l'ours noir et implications pour la conservation du caribou de la Gaspésie » Thèse. Montréal (Québec, Canada), Université du Québec à Montréal, Doctorat en biologie.

Fichier(s) associé(s) à ce document :
[img]
Prévisualisation
PDF
Télécharger (3MB)

Résumé

Les modifications de l'habitat (perte et fragmentation) sont considérées comme la principale cause de perte de biodiversité à l'échelle planétaire. Ces changements peuvent bouleverser l'équilibre des écosystèmes présents, contraignant certaines populations à ne subsister que dans les habitats résiduels où elles sont souvent isolées et limitées à une petite taille. Inversement, les modifications de l'habitat peuvent favoriser d'autres espèces qui se trouvaient jusque là limitées par les conditions existantes. Une problématique importante survient quand les espèces favorisées sont susceptibles d'avoir un impact négatif important sur une population déjà fragilisée par les modifications de l'habitat. Une situation de ce type existe pour le caribou de la Gaspésie, une population considérée « en voie de disparition » vivant principalement dans un parc de conservation, mais fréquentant également des secteurs où les modifications d'habitats sont importantes en raison de la coupe forestière. En outre, ces dernières sont susceptibles de favoriser les prédateurs de cette population de caribous, l'ours noir (Ursus americanus) et le coyote (Canis latrans). Deux sessions d'un programme de contrôle des prédateurs réalisés entre 1990 et 1996 puis de façon récurrente depuis 2001 avaient pour but de limiter les populations de ces prédateurs dans les secteurs utilisés par les caribous mais, afin d'assurer une protection à long terme, d'autres connaissances étaient nécessaires. Cette thèse de doctorat avait pour principal objectif d'accroître l'état des connaissances sur l'utilisation de l'espace par l'ours noir et le coyote et de détailler plus spécifiquement comment les caractéristiques d'un milieu boréal et montagnard influencent la sélection de l'habitat par l'ours noir. À l'aide de ces données nous désirions accroître l'information permettant d'identifier des mesures pour limiter les interactions de ces prédateurs avec les caribous de la Gaspésie. Un suivi télémétrique réalisé au cours de trois années (juillet 2002 -novembre 2005) sur 24 ours noirs et 16 coyotes équipés de colliers GPS a servi de base à ce projet. L'analyse des patrons d' utilisation de l'espace par ces deux espèces nous a permis de montrer que malgré une faible densité de leurs populations respectives, la taille et l'organisation spatiale de leurs domaines vitaux pouvaient leur permettre d'accéder en grand nombre aux zones utilisées par les caribous. Les mouvements des prédateurs s'étendaient à une échelle beaucoup plus grande que celle à laquelle avait eu lieu les deux sessions du programme de contrôle des prédateurs. Ces caractéristiques expliquaient probablement la durée limitée des effets positifs du contrôle sur le recrutement du caribou après l'arrêt du premier programme de contrôle. Les patrons d'utilisation de l'espace des prédateurs pouvaient expliquer également le maintien du nombre de prédateurs capturés annuellement lors de la deuxième période de contrôle, et ce, malgré une pression de piégeage importante. Afin d'assurer la protection des caribous à long terme, nos résultats suggèrent également l'importance d'aménager l'habitat autour du parc de la Gaspésie et d'y limiter les populations de proies alternatives comme les orignaux de façon à ne pas favoriser les prédateurs. Grâce aux données précises obtenues avec les colliers GPS nous avons modélisé la sélection de l'habitat par l'ours noir sous la forme d'une fonction de sélection des ressources (FSR). En incluant dans l'analyse plusieurs facteurs biotiques et abiotiques, nous avons mis en évidence diverses adaptations comportementales de l'ours noir à la forêt boréale. À l'aide d'une analyse du régime alimentaire et d'un suivi de la phénologie des plantes, nous avons détecté des modifications temporelles dans leur sélection de l'habitat en réponse aux changements de la disponibilité des ressources alimentaires. Ainsi, les ours faisaient des mouvements altitudinaux saisonniers. Au printemps, ils utilisaient principalement les espèces graminoïdes qu'ils trouvaient sur les sommets des montagnes. En été, par contre, ils se nourrissaient de fruits mous (e.g. framboises, fruits d'aralie et de cornouiller stolonifère) qu'ils recherchaient à basse altitude dans les milieux perturbés issus d'épidémies d'insectes et de certains types de coupes forestières. Enfin, en automne, les ours se déplaçaient vers les moyennes altitudes et utilisaient des secteurs faiblement ensoleillés, recherchant probablement des milieux dans lesquels la phénologie des plantes était retardée. Les fruits du sorbier (Sorbus americana) représentaient alors une très grande proportion de leur régime alimentaire. Des résultats de cette étude, nous proposons des aménagements de l'habitat, qui pourraient être mis en oeuvre pour limiter la présence de l'ours noir à proximité de la population de caribous de la Gaspésie. Ainsi, les coupes forestières de type CPRS devraient être évitées car elles aboutissent à la création de milieux riches en fruits qui sont particulièrement recherchés par les ours. Les coupes partielles devraient par contre être privilégiées car elles sont généralement peu utilisées, voir évitées. Comprendre comment les animaux réagissent à l'hétérogénéité de l'environnement est crucial si on veut comprendre l'impact des modifications de l'habitat. En nous basant sur la méthode des « temps de premier passage » (« First-passage time »), nous avons pu montrer que les ours ne parcouraient pas le milieu aléatoirement, mais qu'ils regroupaient leurs activités selon deux échelles spatiales. La taille des échelles spatiales utilisées par les ours variait au cours de l'année, vraisemblablement en réponse au changement de la disponibilité des ressources alimentaires. En considérant les échelles de sélection détectées chez chacun des individus, nous avons pu montrer que les variations dans les patrons de déplacements des ours noirs étaient associées à certaines variables comme la proportion de milieux perturbés ou dénudés, l'altitude et l'irradiation solaire, mais que l'effet de ces variables pouvaient changer au cours de l'année. Les patrons de distribution des espèces sont très importants à prendre en compte pour identifier les secteurs d'intérêt dans une problématique de conservation. Ainsi, une connaissance détaillée de l'écologie de l'espèce à protéger est essentielle pour réussir un programme de rétablissement. Toutefois, lorsque cette espèce est menacée par la prédation, nos résultats montre qu'il est également indispensable de considérer l'utilisation de l'espace et la sélection de l'habitat des prédateurs afin de définir les éléments du paysage et les échelles à considérer pour réaliser des aménagements d'habitats qui favoriseront une protection durable pour les espèces menacées. ______________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : Utilisation de l'espace, Sélection de l’habitat, Échelles de sélection, Conservation, Espèces menacées, Ours noir, Coyote, Caribou.

Type: Thèse ou essai doctoral accepté
Informations complémentaires: La thèse a été numérisée telle que transmise par l'auteur.
Mots-clés ou Sujets: Ours noir, Forêt boréale, Habitat faunique, Caribou, Espèce menacée, Coyote
Unité d'appartenance: Faculté des sciences > Département des sciences biologiques
Déposé par: RB Service des bibliothèques
Date de dépôt: 16 sept. 2008
Dernière modification: 01 nov. 2014 02:05
Adresse URL : http://archipel.uqam.ca/id/eprint/972

Statistiques

Voir les statistiques sur cinq ans...