Kwok Choon, Mary Jane
(2016).
« Les perceptions de la vie privée des jeunes adultes liées à leurs pratiques et usages des réseaux socionumériques : le paradoxe de la vie privée revisité » Thèse.
Montréal (Québec, Canada), Université du Québec à Montréal, Doctorat en communication.
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Résumé
Cette thèse analyse les rapports qu'entretiennent les jeunes adultes avec la vie privée à partir de l'étude de leurs usages des réseaux socionumériques et des pratiques et perceptions de la vie privée qui y sont associées. Les résultats montrent que ces jeunes adultes utilisent Facebook pour pratiquer de la surveillance sociale, mettre à jour leurs statuts, contribuer aux conversations en lien avec les travaux universitaires, et communiquer avec leurs pairs par le biais de la messagerie. Sur Twitter, ils suivent l'actualité, miment les pratiques de microcélébrité, et font signe à leurs amis. L'exposition de soi est liée à des formes de visibilité en tant que reconnaissance (visibility as recognition). Au cours du processus, des bénéfices émotionnels, sociaux et liés au rendement sont obtenus. Ces jeunes adultes veulent accumuler du bonding et du bridging capital social à travers leurs usages de Facebook. Ils essaient de négocier leur vie privée en alternant entre l'exposition de soi et le fait de dissimuler des informations. Plusieurs stratégies sont mobilisées au cours des interactions : la stéganographie sociale, la suppression des connaissances de la liste d'amis, le fait de communiquer en « privé » par le biais de la messagerie Facebook, et l'autocensure. La négociation de la vie privée au cours des interactions s'avère plus importante pour ces jeunes, que les moyens que les proposent ces sites web pour protéger leur vie privée. En effet, les conditions liées aux paramètres de confidentialité sur les deux sites ont été rarement lues. À la lecture de la section de confidentialité sur Facebook, ces usagers ont constaté avec une certaine inquiétude que leurs profils sont répertoriés par les moteurs de recherche externes au site, que des applications ont accès à leurs informations par le biais de leurs amis et que les photos de profil sont exposées au public. Ces jeunes adultes ont aussi découvert que leur profil sur Twitter étaient répertoriés par les moteurs de recherche externes. Nous avons noté une certaine difficulté chez ces jeunes à comprendre les discours qui décrivent les politiques de confidentialité et les conditions de service des RSN. Le « publiquement privé » et le contexte sont des notions autour desquelles s'orientent les perceptions de la vie privée. Du point de vue de ces usagers, les RSN sont des espaces au sein desquels des informations relevant de l'ordre du « privé » et du « public » peuvent être exposées devant une audience composée des amis, des connaissances ou des étrangers. Les usagers peuvent faire face à des collisions et des collusions de contextes par moments. La norme de la vie privée associée à leurs pratiques sur Facebook est l'intégrité contextuelle tandis que celle qui correspond aux pratiques de Twitter est la « transparence négociée ». Pour définir ce qui relève du « public » et du « privé », ces jeunes adultes prennent en considération : le degré d'accès au site et à leurs profils, les risques pour la vie privée, le contrôle sur la négociation des frontières entre le « public » et le « privé », y compris une maîtrise de l'information publiée en contexte, et les espaces « publics » et « privés » au sein des RSN. La protection de la vie privée par rapport aux usages de ces deux sites se résume à avoir une protection contre la surveillance, et un contrôle sur la négociation des frontières entre le « public » et le « privé », y compris une maîtrise sur la diffusion de l'information en contexte. La protection de la vie privée favorise la liberté d'expression, elle est ainsi importante pour le développement des relations sociales, et l'autonomie d'action. Dans un contexte physique, elle se résume à une protection de l'intimité. Nous avons noté qu'ils n'ont pas exprimé le souhait d'avoir un contrôle sur l'usage des données personnelles par les institutions et les tiers. Les rapports qu'entretiennent les individus avec la vie privée sont complexes et de nature paradoxale. Le désir de s'exposer est intrinsèquement lié au besoin de protéger sa vie privée. En comparaison aux études antérieures, cette thèse a mis en évidence les différents facteurs qui façonnent cette relation paradoxale. Les facteurs sont la perception d'un contrôle sur la diffusion de l'information au sein d'un contexte, une forme de confiance mal placée en ces sites de réseaux sociaux, la faible visibilité des pratiques de surveillance en contexte et le caractère éloigné des intrusions, une connaissance limitée des modes opératoires des sites web, notamment une connaissance restreinte en matière de surveillance institutionnelle et des paramètres de confidentialité, les changements architecturaux, la confiance sociale faible envers les amis Facebook, et un sentiment de sécurité ontologique. Ces usagers intériorisent volontairement et involontairement la surveillance pour obtenir divers bénéfices. Une forme de tyrannie est liée à la vie privée. D'un côté, ces utilisateurs s'exposent et adhèrent à certaines normes du paraître en vue d'obtenir des bénéfices immédiats et futurs. De l'autre côté, sur les RSN s'exerce le tri panoptique et des mécanismes de visibilité sont utilisés pour recueillir efficacement les données personnelles. Finalement, cette thèse déplace l'attention du couple « risques-opportunités » quand il s'agit de comprendre l'exposition de soi dans le contexte des RSN vers une analyse des relations complexes entre la visibilité, la surveillance, la vie privée et l'autonomie des usagers. Ces jeunes adultes n'ont pas une connaissance approfondie des modes opératoires de la technologie contrairement aux représentations qui sont généralement associées aux usagers faisant partie de la catégorie des « natifs numériques ». Ils ne sont pas inconscients des dangers liés aux réseaux socionumériques et en train de s'exhiber tels que l'évoquent certains discours à leurs sujets dans les médias. La faible visibilité dont jouit l'annonce des changements architecturaux en contexte et les pratiques de surveillance court-circuitent la protection de la vie privée. Nous notons l'existence de « tensions » entre les logiques d'action utilitaire, d'intégration et critique, elles-mêmes façonnées par la logique de ces réseaux de communication. De ce fait, nous recommandons que ces sites développent des pratiques de traitement de l'information plus justes. Il est aussi important de favoriser une éducation critique aux médias même à un âge adulte, compte tenu de la vitesse à laquelle ces sites se développent et de la compétence technique faible de la majorité des usagers.
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MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : vie privée, surveillance, usages, pratiques, exposition de soi, perceptions, visibilité, jeunes adultes, Québécois, réseaux socionumériques, Facebook, Twitter, « publiquement privé », contexte, paradoxe de la vie privée.
Type: |
Thèse ou essai doctoral accepté
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Informations complémentaires: |
La thèse a été numérisée telle que transmise par l'auteur. |
Directeur de thèse: |
George, Éric |
Mots-clés ou Sujets: |
Médias sociaux / Vie privée / Présentation de soi / Jeunes adultes -- Québec (Province) -- Attitudes / Facebook (Site Web) / Twitter |
Unité d'appartenance: |
Faculté de communication |
Déposé par: |
Service des bibliothèques
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Date de dépôt: |
07 oct. 2016 18:54 |
Dernière modification: |
07 oct. 2016 18:54 |
Adresse URL : |
http://archipel.uqam.ca/id/eprint/8933 |