Perron, Marie-Ève
(2016).
« Impact de la possibilité de rachat sur la prise de perspective et l'état émotionnel à la suite de la commission d'une transgression sociale » Thèse.
Montréal (Québec, Canada), Université du Québec à Montréal, Doctorat en psychologie (Essai doctoral).
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Résumé
Les écrits scientifiques démontrent deux réactions émotionnelles principales suite à la commission d'une transgression sociale : la honte (associée à la colère) et la culpabilité. Or, par rapport à la culpabilité, la honte est moins adaptative, car elle est liée à la psychopathologie et à une moindre prise de perspective. Cette étude vise à vérifier si la manipulation de la possibilité de rachat peut influencer favorablement la réaction émotionnelle et la prise de perspective à la suite d'une transgression sociale. Le protocole implique la mesure de trois variables contrôles, soit l'estime de soi, la tendance à la culpabilité (TC) et la tendance à la honte (TH). Pour mesurer ces deux dernières variables, une version québécoise du Test of Self-Conscious-Affect 3 (TOSCA-3) (Tangney et al., 2000) a été produite et validée. Un devis de recherche expérimental à deux groupes (groupe AVEC : avec possibilité de rachat et groupe SANS : sans possibilité de rachat) avec mesures répétées (avant et après l'induction de la transgression en laboratoire) a été utilisé. La transgression sociale a été induite par un protocole d'effet porte-au-nez (door-in-the-face), la possibilité de rachat offerte au groupe AVEC consistant en une requête prosociale moins exigeante que la première. Afin de mesurer la prise de perspective, deux tâches équivalentes de prise de perspective situationnelle ont été créées, de sorte à pouvoir les utiliser dans un devis de recherche intrasujet. La Positive and Negative Affect Schedule (Watson et al., 1988) a été utilisée pour mesurer les affects. Les hypothèses proposent que comparativement au groupe SANS, le groupe AVEC ressentira plus de culpabilité, moins de honte, moins de colère et performera mieux à une tâche de prise de perspective. Les résultats obtenus ne confirment pas les hypothèses. Toutefois, en comparant les sujets du groupe AVEC ayant décidé de se racheter (groupe Racheté) aux autres participants (groupe Non-Racheté), une différence significative apparaît sur le plan de la prise de perspective. Le groupe Non-Racheté présente ainsi une détérioration de la prise de perspective suite à la transgression, contrairement au groupe Racheté. Ces résultats démontrent donc qu'afin d'éviter la diminution d'une réaction cognitive adaptative comme la prise de perspective, il faut favoriser l'engagement au rachat, et non pas seulement faciliter la perception d'une possibilité de rachat. De plus, des analyses corrélationnelles entre les changements d'affects et le changement de prise de perspective à l'intérieur des groupes Racheté et Non-Racheté enrichissent la compréhension de l'interaction entre la variation des affects et de la prise de perspective. De plus, ce travail a des implications théoriques intéressantes. D'abord, le haut taux de rachat trouvé par nos participants dans le groupe AVEC (80%) n'était pas associé à la culpabilité. Ceci remet donc en question la pertinence de faire étroitement correspondre à la culpabilité la volonté de rachat, comme le font les instruments les plus établis pour mesurer la TC (Cohen et al., 2011; Tangney et al., 2000). Finalement, des mesures situationnelles de prise de perspective sont rarement utilisées contrairement à l'Interpersonal Reactivity Index (Davis, 1980), une mesure dispositionnelle massivement utilisée. Or, ce travail montre que l'utilisation d'une mesure situationnelle remet en question le lien fort établi entre la prise de perspective et la TC. Cette étude génère donc de nouvelles hypothèses de recherche dans le domaine des émotions morales et de la prise de perspective. Une introduction générale au chapitre I de ce document permet d'abord de présenter une vue d'ensemble de l'étude. Le contexte théorique est ensuite présenté, de même que les concepts et définitions utiles à l'étude. Le chapitre II présente la méthodologie en détaillant le protocole et les instruments de mesures utilisés. Le chapitre III décrit les principaux résultats obtenus concernant l'impact de la possibilité de rachat sur les réactions cognitives et émotionnelles présentées suite à la commission d'une transgression sociale. Enfin, le chapitre IV établit une discussion générale à l'égard des résultats obtenus et propose des considérations méthodologiques et cliniques. Finalement, la conclusion permet de souligner les éléments clés ainsi que les forces et les limites de l'étude, en plus de proposer quelques pistes de recherches futures.
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MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : prise de perspective, culpabilité, honte, transgression sociale, porte-au-nez