Landry, Tina
(2010).
« La dyspareunie chez les adolescentes : prévalence, caractéristiques et corrélats biopsychosociaux » Thèse.
Montréal (Québec, Canada), Université du Québec à Montréal, Doctorat en psychologie.
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Résumé
Problématique: Les études épidémiologiques récentes suggèrent que la prévalence de la dyspareunie est de 12% à 21 % chez les femmes adultes et que son incidence augmente. Alors que les données cliniques suggèrent que la dyspareunie débute fréquemment à l'adolescence, sa prévalence au sein de cette population reste inconnue. Par ailleurs, bien que plusieurs variables biomédicales et psychosociales aient été associées à la dyspareunie au cours des dernières années, son étiologie demeure mal expliquée. Alors qu'une majorité de ces variables concerne des manifestations qui se présentent souvent à l'adolescence, elles n'ont jusqu'à maintenant été étudiées que de façon rétrospective auprès d'une population adulte.
Objectifs et hypothèses: Cette thèse doctorale a comme objectifs principaux d'explorer la prévalence, les caractéristiques et les corrélats biopsychosociaux de la dyspareunie chez les adolescentes. Il est prédit que la prévalence de la dyspareunie sera d'environ la moitié de celle retrouvée chez les femmes adultes, que les adolescentes en souffrant rapporteront plus de douleur vulvo-vaginale dans des contextes d'insertion non-sexuels que celles du groupe témoin et que leur dyspareunie sera davantage chronique, primaire et douloureuse à l'entrée du vagin. Par ailleurs, il est prédit que les infections urinaires, l'utilisation de crèmes vaginales antifongiques, l'évitement des tampons et des relations sexuelles ainsi que l'agression sexuelle seront significativement corrélés à la dyspareunie chronique chez les adolescentes, alors que les infections vaginales, l'utilisation précoce/prolongée de la pilule contraceptive et l'anxiété seront ses prédicteurs statistiques. Méthodologie: Les participantes ciblées dans cette étude transversale corrélationnelle sont 1425 adolescentes du secondaire 1 à 5 recrutées dans sept écoles francophones de Montréal et de ses environs. Suite à l'obtention de leur consentement écrit, la collecte de données a été effectuée à l'aide de cinq questionnaires auto-administrés: 1-un questionnaire maison portant sur la santé gynécologique/sexuelle, la prévalence/les caractéristiques de la dyspareunie et la violence physique/psychologique/sexuelle, 2-l'Inventaire d'anxiété situationnelle et de trait d'anxiété-Forme Y, 3-l'Inventaire de dépression de Beck-II, 4-l'Inventaire des attitudes envers la sexualité et 5-le Questionnaire de perception de soutien social. La prévalence de la dyspareunie a été évaluée en demandant aux filles actives sexuellement si elles ressentent régulièrement (au moins 75% du temps) de la douleur pendant les relations sexuelles avec pénétration pénis-vagin.
Résultats: L'étude 1 s'attarde à la prévalence et les caractéristiques de la dyspareunie tout en examinant la douleur vulvo-vaginale dans des contextes d'insertion non-sexuels et montre d'abord que 20% des filles actives sexuellement rapportent avoir de la douleur régulière pendant les relations sexuelles d'une durée de six mois ou plus. Une forme primaire de dyspareunie est signalée par 67% des adolescentes et significativement plus de filles souffrant de dyspareunie chronique identifient l'entrée vaginale comme étant leur site le plus douloureux. Le groupe dyspareunie rapporte également avoir significativement plus de douleur durant l'insertion de leur premier tampon et durant l'insertion habituelle de tampons que le groupe témoin, alors que les groupes ne diffèrent pas quant à la douleur durant leur dernier examen gynécologique. Par ailleurs, l'étude 2 se penche sur les corrélats biopsychosociaux et le groupe dyspareunie, comparativement au groupe témoin, se différencie à la hausse de façon significative sur les sept variables suivantes: la douleur durant l'insertion du premier tampon, la douleur durant l'insertion habituelle du tampon, l'évitement du tampon, les habitudes hygiéniques vulvo-vaginales potentiellement nuisibles, la peur de l'abus physique, l'agression sexuelle et le trait d'anxiété. Suite à une régression logistique, seule la douleur à l'insertion du premier tampon et le trait d'anxiété ressortent toutefois comme prédicteurs statistiques de la dyspareunie chez les adolescentes. Conclusions et implications: Les résultats reproduisent les estimations de prévalence retrouvées dans les études épidémiologiques auprès des femmes adultes et suggèrent que la dyspareunie est hautement prévalente chez les adolescentes, cette douleur s'étalant au-delà des relations sexuelles aux contextes non-sexuels tels que l'insertion du premier tampon. Pourtant, contrairement aux études effectuées avec les femmes adultes, les groupes ne diffèrent pas sur les variables biomédicales mesurées. Les résultats suggèrent plutôt que, outre la possibilité d'une vulnérabilité intrinsèque à la douleur vulvo-vaginale chronique, les variables psychosociales telles que l'anxiété jouent un rôle important dans la dyspareunie chez les adolescentes. Considérant les conséquences négatives de la dyspareunie et sa prévalence élevée chez les jeunes filles, des stratégies de détection et d'interventions multidimensionnelles ciblées envers cette population sont nécessaires. ______________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : Dyspareunie, Douleur vulvo-vaginale, Prévalence, Étiologie, Adolescentes.