Systèmes alimentaires circulaires : l'influence de la gouvernance, des imaginaires et des dynamiques organisationnelles à travers le cas de Saint-Hyacinthe, Montérégie

Lacombe, Valérie (2025). « Systèmes alimentaires circulaires : l'influence de la gouvernance, des imaginaires et des dynamiques organisationnelles à travers le cas de Saint-Hyacinthe, Montérégie » Thèse. Montréal (Québec), Université du Québec à Montréal, Doctorat en sciences de l'environnement.

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Résumé

Malgré des avancées technologiques, des modèles d’affaires innovants et des programmes de financement croissants, la transition vers l’économie circulaire (ÉC) reste souvent confinée à des initiatives de niche, avec une diffusion à grande échelle limitée. Ce blocage soulève une question : au-delà des leviers concrets déjà largement mobilisés (technologies, accompagnement, financement), dans quelle mesure les facteurs moins tangibles, tels que l’imaginaire collectif, la gouvernance et les dynamiques organisationnelles, influencent-ils la transition vers l’ÉC ; et comment leur prise en compte peut-elle constituer un levier pour son élargissement et sa pérennisation ? Cette thèse examine ces trois dimensions encore peu explorées dans le domaine de l’ÉC appliquée aux systèmes alimentaires régionaux, en s’appuyant sur l’étude de cas de Saint-Hyacinthe, technopole agroalimentaire située en Montérégie, une région récemment engagée dans une feuille de route pour l’ÉC, alignée sur ses priorités et son dynamisme régional en bioalimentaire. Le premier article explore, dans une perspective coévolutive, l’influence réciproque entre les imaginaires, récits et discours de l’ÉC et ceux des systèmes alimentaires durables (SAD), chacun contribuant à façonner les pratiques et représentations de l’autre. L’étude mobilise trois mécanismes issus des théories des réseaux sociaux (i.e. proximité, relationnels et similarité dyadique) en les articulant à un cadre théorique combinant néo-institutionnalisme, diffusion des innovations et représentations sociales. L’article démontre comment l’introduction de l’ÉC dans les SAD a donné lieu à des dynamiques sélectives de légitimation ayant favorisé la mise en avant d’initiatives technocentrées, tout en marginalisant des approches sociales et communautaires. Les mécanismes de proximité ont facilité l’adoption de pratiques circulaires en renforçant un imaginaire d’efficience technique, tout en simplifiant les enjeux en réduisant les SAD à des concepts comme le recyclage. Par ailleurs, les mécanismes relationnels ont permis de légitimer des innovations circulaires, mais en consolidant des récits dominés par des intérêts économiques, au détriment d’une diversité d’approches à valeur non marchande. Enfin, les mécanismes de similarité dyadique ont favorisé des alliances entre acteurs partageant des intérêts communs, mais ont conduit à la marginalisation de pratiques locales plus inclusives. Le deuxième article analyse la gouvernance institutionnelle en analysant comment les dynamiques municipales et régionales influencent la portée et la mise en oeuvre des systèmes alimentaires circulaires. D’un point de vue théorique, nous mobilisons le cadre tridimensionnel de DiGaetano et Strom (2003), qui inclut : 1) la dimension structurelle, basée sur la théorie du « principal-agent » et le concept d’« institutedness » de Polanyi, pour explorer les interactions entre organisations institutionnelles et leur capacité à aligner rôles et responsabilités ; 2) la dimension rationnelle, inspirée de l’économie politique urbaine et de la théorie du choix public pour examiner comment des intérêts divergents (économiques, environnementaux et sociaux) influencent la conception et l’adoption des politiques circulaires ; 3) la dimension culturelle, axée sur l’entrepreneuriat institutionnel, qui met en lumière le rôle des stratégies informelles dans l’initiation et la pérennisation des pratiques circulaires. Nous montrons que, bien que la gouvernance adaptée au contexte local favorise l’engagement, elle peut également produire des résultats inégaux. Ces inégalités découlent de tensions entre des objectifs axés sur le marché et des ambitions de durabilité, exacerbées par une confusion des rôles parmi les autorités publiques. Les résultats révèlent aussi que, dans les contextes où la coordination institutionnelle est limitée, les stratégies informelles émergent comme des solutions essentielles pour surmonter les lacunes et avancer dans les initiatives circulaires. Finalement, le troisième article se concentre sur les dynamiques organisationnelles dans les chaînes de valeur alimentaires et examine comment les capacités, intérêts et attitudes des acteurs influencent les stratégies d’ÉC. En mobilisant la théorie des jeux, nous analysons les tensions entre coopération et concurrence à travers quatre dynamiques de gestion : 1) la gestion négociée, qui met en évidence des collaborations équilibrées, mais fragiles, entre acteurs ; 2) le leadership contrarié, où des innovateurs rencontrent des résistances structurelles et institutionnelles ; 3) les relations hiérarchiques, qui reflètent des asymétries de pouvoir favorisant les acteurs dominants ; 4) la gestion concurrentielle, où les comportements opportunistes freinent la coopération. Si les résultats montrent que ces dynamiques varient selon les étapes de la chaîne de valeur, ils démontrent que les stratégies les mieux soutenues ne sont pas nécessairement celles ayant le plus fort potentiel de transformation, mais plutôt celles qui s’alignent sur les intérêts dominants et les capacités disponibles, tandis que les initiatives nécessitant des changements structurels tendent à être tolérées ou marginalisées. Les dynamiques observées en aval dépendent par ailleurs fortement des conditions créées en amont, soulignant l’interdépendance des stratégies et la nécessité d’une approche plus coordonnée. Pris ensemble, ces trois articles montrent que la transition vers une ÉC dans les systèmes alimentaires ne peut être comprise uniquement à travers des dimensions logistiques, techniques ou économiques. Elle repose aussi sur l’articulation entre imaginaires, gouvernance et dynamiques organisationnelles. Ces dimensions intangibles, souvent sous-estimées, conditionnent la légitimation de certains récits, la répartition des bénéfices et la stabilité des collaborations. En les replaçant au coeur de l’analyse, la thèse met en lumière l’importance d’approches intégrées et contextualisées, capables de conjuguer à la fois les dimensions matérielles et immatérielles pour élargir et pérenniser la transition circulaire. _____________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : systèmes alimentaires circulaires ; transition socioécologique ; gouvernance alimentaire ; transitions durables

Type: Thèse ou essai doctoral accepté
Informations complémentaires: Fichier numérique reçu et enrichi en format PDF/A.
Directeur de thèse: Rajaonson, Juste
Mots-clés ou Sujets: Économie circulaire / Systèmes alimentaires / Alimentation durable / Politique alimentaire / Transition socio-écologique
Unité d'appartenance: Instituts > Institut des sciences de l'environnement (ISE)
Déposé par: Service des bibliothèques
Date de dépôt: 26 sept. 2025 09:55
Dernière modification: 26 sept. 2025 09:55
Adresse URL : http://archipel.uqam.ca/id/eprint/19137

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