Campeau-Hunziker, Isabelle
(2024).
« Il en faut peu pour être heureux : le rôle de l'auto-compassion pour limiter une orientation matérialiste » Thèse.
Montréal (Québec), Université du Québec à Montréal, Doctorat en psychologie.
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Résumé
Les problèmes de santé mentale ont constamment augmenté depuis les 80 dernières années (Twenge et al., 2010). Plusieurs hypothèses ont été avancées puis démenties pour expliquer ces hausses : les récessions économiques n’expliquent pas ces augmentations ni le stigma associé aux maladies mentales pour obtenir l’aide nécessaire. D’après Twenge et ses collègues, une meilleure explication réside dans un changement culturel, où les valeurs extrinsèques comme le matérialisme et le statut prennent plus d’importance au détriment des valeurs intrinsèques comme la communauté, le sens de la vie et les relations personnelles (Dittmar et Hurst, 2017; Twenge et Kasser, 2013). Le matérialisme repose sur la quête excessive d'acquisition de biens, faisant des biens matériels la motivation principale vers la route du bonheur et du succès (Richins et Dawson, 1992). Or, la littérature sur le sujet révèle que la richesse et l'acquisition d'objets ne sont que des illusions du bonheur puisque les individus présentant une forte orientation matérialiste ont des niveaux de bonheur inférieurs, moins de bien-être subjectif, plus de symptômes dépressifs et anxieux et moins de relations interpersonnelles (Belk, 1985; Kasser, 2016; Richins et Dawson, 1992). Conséquemment, le matérialisme est un phénomène de plus en plus alarmant pour les individus, la société et l'environnement (Polark et McCullough, 2006). Il est donc important de réduire le matérialisme suite aux nombreuses conséquences engendrées par cette orientation. Bien que plusieurs études aient illustré les conséquences négatives du matérialisme, peu d’études ont examiné les différences individuelles qui peuvent protéger les individus de développer une orientation matérialiste. Une solution possible semble être l'auto-compassion : la bienveillance envers soi-même en période de souffrance et d’adversité (Neff, 2003a; D. Watson, 2018). L’objectif général du projet de recherche était d’examiner le rôle protecteur de l’auto-compassion sur le matérialisme ainsi que les mécanismes qui permettent d’expliquer la relation négative entre l’auto-compassion et le matérialisme. La première étude, comprenant un échantillon final de N = 141 participants, a cherché à évaluer si induire un état d’auto-compassion permettait de réduire le niveau de matérialisme, même après avoir été exposés à des publicités matérialistes. À l’aide d’un devis expérimental 2×2, les participants étaient assignés à la condition d’auto-compassion ou contrôle d’écriture puis étaient exposés à trois publicités matérialistes ou trois publicités neutres. Les résultats suggèrent qu’un plus haut niveau général d’auto-compassion induit est associé à moins de matérialisme dans la vie. Cependant, aucune différence entre les différents groupes n’a été observée. Peu importe si les participants étaient assignés au groupe d’auto-compassion ou au groupe contrôle d’écriture, le niveau de matérialisme était similaire. Une seconde étude comprenant un échantillon de N = 252 participants au T1, n = 227 au T2 et n = 208 au T3 a examiné si l’évitement expérientiel et la discordance de soi permettent d’expliquer l’association négative entre l’auto-compassion et le matérialisme et si en retour, le matérialisme est associé à moins de bien-être. Les résultats suggèrent que l’évitement expérientiel médie la relation entre l’auto-compassion et le matérialisme, mais ce lien n’était pas significatif pour la discordance de soi. Finalement, la relation entre le matérialisme et le bien-être était plus nuancée, où certaines sous-dimensions du matérialisme étaient davantage associées au bien-être que d’autres. Il semblerait donc que les individus avec un plus haut niveau d’auto-compassion éviteraient moins leurs sensations, émotions et pensées négatives et en retour, seraient moins enclins à consommer des biens matériels. Maintenant plus que jamais, l’auto-compassion offre un avenir prometteur pour diminuer le matérialisme, où les biens matériels sont de plus en plus facilement accessibles, notamment avec l’achat en ligne.
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MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : auto-compassion, matérialisme, évitement expérientiel, discordance de soi, bien-être