Chiche, Axel; Lachapelle, Ugo et Bédard, Roxane
(2023).
Regards et expériences de l’épicerie en ligne chez les aînés québécois via une analyse de commentaires écrits : Tentatives, réticences et complémentarité.
Université du Québec à Montréal, Département d'études urbaines et touristiques, Montréal, 17 p.
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Résumé
Dans le cadre d’une enquête sur l’achat d’épicerie en ligne et les habitudes d’achat alimentaires, deux vagues de collecte de données ont été menées auprès des membres de la Fédération de l’Âge d’Or du Québec (FADOQ) : début 2020 (1173 répondants) et début 2021 (1343 répondants). Les enquêtes s’intéressaient notamment aux choix modaux pour l’approvisionnement alimentaire ainsi qu’à l’adoption et qu’aux barrières à une transition vers l’épicerie en ligne. Cette forme d’approvisionnement alimentaire peut permettre de prolonger la vie autonome des populations âgées. Le sondage de 2021 comportait une section d’enquête additionnelle relative aux changements de comportements liés à la COVID-19.
Parmi les données collectées, un corpus de 425 réponses à la seule question ouverte des enquêtes fut retenu pour analyse qualitative : « Avez-vous des commentaires sur le questionnaire ou sur le projet de recherche ? » Ce corpus rassemble une diversité de remarques sur une ou plusieurs thématiques rattachées à l’enquête. Du fait de la nature ouverte de la question, on retrouve dans les réponses les thématiques qui interpellent particulièrement les répondants. Une analyse qualitative menée à l’aide du logiciel NVivo nous a permis d'identifier des préoccupations et des attentes relatives à l’approvisionnement en ligne basées sur des expériences vécues et sur des préconceptions.
Dans un premier temps, nous identifions et traitons les thématiques saillantes du corpus (perceptions et freins à l’épicerie en ligne; habitudes de mobilité; revendications relatives à l’approvisionnement). Dans un second temps, nous abordons les changements dans les pratiques d’approvisionnement et dans les perceptions liées aux restrictions sanitaires introduites pour faire face à la COVID-19. Ces dernières ont amené plusieurs consommateurs à essayer l’achat en ligne. Les réponses de la deuxième vague d’enquête sont donc plus souvent basées sur des expériences vécues que sur des préconceptions.
L’analyse des perceptions et de leur rôle sous-jacent dans les pratiques d’approvisionnement met en lumière le besoin d’une meilleure communication auprès des consommateurs du bel âge sur les fonctionnalités et les services offerts par l’achat en ligne. En effet, l’épicerie « en présentiel » s’avère une activité qui, selon les commentaires, est souvent sociale, aux stimulations multiples et aux bénéfices importants pour la santé et pour l’esprit. Peu de répondants se disent prêts à abandonner cette activité. Il faut donc réfléchir aux meilleurs moyens de faciliter la complémentarité des deux pratiques et la préparation à la transition vers ce mode d’achat dans une perspective à long terme de perte inévitable de mobilité. L’achat en ligne semble d’ailleurs devenir mieux accepté dans un contexte de perte d’autonomie. Il peut permettre de tout du moins prolonger cette autonomie.
L’achat en ligne est souvent perçu par les non-usagers comme une solution de dernier recours aux enjeux d’autonomie (vieillissement; détérioration de la condition physique; réduction de la capacité de mobilité). Pour les usagers, il s’agit plutôt d’une aide ponctuelle face à un défi donné : condition climatique, forme physique temporaire, quantité achetée et poids des paquets ainsi que restrictions sanitaires.
Si plusieurs l’ont maintenant essayé, poussés notamment par les restrictions sanitaires liées à la Covid-19, nombreux n’ont pas apprécié leur expérience. Cela s’explique notamment parce que les premiers essais ont été menés dans des circonstances où la demande excédait la capacité des services, ce qui a causé des files d’attente virtuelles, des délais de livraison importants et l’emploi de personnel mal formé. Bien que la Covid-19 ait permis à plusieurs de se familiariser avec l’approche, un apprentissage potentiellement utile à plus long terme, elle ne semble pas avoir conquis une population aux habitudes d’achat enracinées.