Bureau, Jolène Audrey
(2023).
« « Veuve de Thermidor » : le rôle et l'influence d'Élisabeth Duplay-Le Bas (1772-1859) sur la mémoire et l'historiographie de la Révolution française » Thèse.
Montréal (Québec, Canada), Université du Québec à Montréal, Doctorat en histoire.
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Résumé
Ces dernières années, la recherche sur la période révolutionnaire s’est intéressée à la littérature du témoignage. Or, le témoignage des femmes est particulièrement rare. À cet égard, Élisabeth Le Bas, née Duplay (1772-1859), est une grande oubliée de la culture populaire et académique de la Révolution française. Fille de Maurice Duplay, le logeur de Maximilien Robespierre, et veuve de Philippe Le Bas, l’un des « martyrs » de Thermidor, elle ne semble pas destinée à s’inscrire dans l’Histoire. Elle ne fut ni une grande écrivaine, ni une militante de première ligne de la Révolution ou des droits des femmes. Elle n’a pas d’article à son nom dans les dictionnaires de la Révolution française, où on la nomme seulement en rapport avec son époux. En 1843, son fils, devenu historien, lui demande de rédiger ses mémoires, qui restèrent inachevés et furent oubliés pendant un demi-siècle. Il s’agit de son héritage à l’Histoire, accompagné d’annotations et d’un projet de réponse à l’Histoire des Girondins d’Alphonse de Lamartine. Regard intime et privilégié sur le cercle des Robespierristes, les écrits d’Élisabeth font état de ses épreuves, de la lutte d’une jeune veuve et mère afin de préserver ses souvenirs et son identité politique. Ses écrits n’ont jamais fait l’objet d’une édition critique ou d’une publication intégrale et indépendante. Son récit est généralement relégué aux marges de la « grande Histoire », perçu avec un sentimentalisme niais et bluette. Et pourtant, elle est la source principale de certains détails historiques fondamentaux, aux côtés de Charlotte Robespierre, soeur de Maximilien et d’Augustin, femme avec qui Élisabeth a d’ailleurs entretenu des rapports aussi proches que tendus. Ensemble, leurs écrits et leur témoignage sont à l’origine de notre connaissance des hommes robespierristes dans leur vie privée. Ce travail propose d’abord de présenter et d’annoter les écrits d’Élisabeth Duplay-Le Bas. Leur rédaction s’inscrit dans un contexte particulier de transition entre mémoire et histoire, alors que les premiers historiens de la Révolution s’empressent d’interroger ses derniers témoins, dont Élisabeth. Nous allons présenter les aléas de la transmission de cette mémoire et de sa mise en récit à travers la genèse du projet d’écriture de son manuscrit. Nous allons aborder la spécificité de son témoignage, soit celui d’une femme robespierriste, et les conséquences de ces identités sur la recherche historique. Sa contribution historique et, surtout, historiographique est irremplaçable en grande partie grâce au manuscrit qu’elle rédigea. Son témoignage permet de remettre en question plusieurs clichés, idées préconçues ou interprétations simplifiées, manquant souvent de nuances, sur la Révolution française, spécifiquement sur la période de l’an II (1793-1794), que l’on tente de faire cadrer dans une analyse idéologique, qu’elle soit marxiste, psychanalytique, ou féministe. Au-delà de ses écrits et de ses interventions auprès de ces premiers historiens, l’importance d’Élisabeth se mesure aussi par sa conscience de préservation du souvenir de son groupe familial et politique – en somme, son action (et non pas sa passivité) face à la mémoire et à l’histoire. Élisabeth Duplay-Le Bas avait conscience de l’histoire qu’elle vivait, qu’elle avait vécu, et de l’héritage dont elle devait devenir la gardienne. La transmission de sa mémoire permet de réfléchir sur les différentes manières d’aborder le témoignage, sous l’angle de la condition féminine, de la construction de l’identité, du passage de la mémoire à l’histoire, ou du rôle joué par la littérature et par la fiction dans l’appréhension de l’histoire. Son récit permet également d’observer l’impact des transformations révolutionnaires sur la domesticité, sur la famille et sur les femmes, et comment la maison de son père devint un lieu de sociabilités de même que de réseaux politiques et militants, s’inscrivant dans le concept de « communauté des affections » développé par Louis-Antoine Saint-Just.
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MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : Révolution française ; histoire des femmes ; témoignage ; histoire et mémoire ; sociabilités.
Type: |
Thèse ou essai doctoral accepté
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Informations complémentaires: |
Fichier numérique reçu et enrichi en format PDF/A. |
Directeur de thèse: |
Bastien, Pascal |
Mots-clés ou Sujets: |
Révolution française / Témoignages / Élisabeth Le Bas (1772-1859) / Manuscrits / Écrits de femmes autobiographiques / Mémoire / Histoire |
Unité d'appartenance: |
Faculté des sciences humaines > Département d'histoire |
Déposé par: |
Service des bibliothèques
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Date de dépôt: |
28 juin 2023 10:36 |
Dernière modification: |
28 juin 2023 11:39 |
Adresse URL : |
http://archipel.uqam.ca/id/eprint/16660 |