Sociocritique d'un « maudit contrat » : le mariage dans les Lettres d'Adélaïde de Dammartin (1766) de Marie-Jeanne Riccoboni

Brassard, Florence (2022). « Sociocritique d'un « maudit contrat » : le mariage dans les Lettres d'Adélaïde de Dammartin (1766) de Marie-Jeanne Riccoboni » Mémoire. Montréal (Québec, Canada), Université du Québec à Montréal, Maîtrise en études littéraires.

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Résumé

Dans la France du milieu du XVIIIe siècle, la conception que l’on se faisait du mariage connut une importante transformation. L’idée qu’il serait souhaitable que les unions soient fondées sur un amour mutuel gagnait de plus en plus d’esprits et de coeurs, alors qu’on avait jusque-là considéré le mariage comme une transaction économique conclue pour le plus grand bénéfice des familles. À l’avant-garde de cette sentimentalisation de l’union matrimoniale, les textes littéraires célébrèrent les promesses et soulignèrent les dangers du mariage d’inclination. Dans les Lettres d’Adélaïde de Dammartin, un roman épistolaire paru en 1766, Marie-Jeanne Riccoboni expose la complexité d’un indissoluble contrat situé au confluent du droit, de l’économie et des sentiments. Ce mémoire met en lumière la portée critique que revêt la représentation du mariage dans cette oeuvre. La perspective sociocritique qu’il adopte permet de rendre raison de la pluralité des discours convoqués par le roman et de l’écart signifiant qu’il produit par rapport à ceux-ci. Le premier chapitre traite de la première union d’Adélaïde, qui est encadrée par un contrat visant à pallier les lacunes du droit matrimonial relativement à la protection de l’épouse. Après une brève synthèse juridico-historique exposant les paradoxes du contrat de mariage et l’inégalité qu’il instaurait entre les époux, ce chapitre analyse la convention matrimoniale régissant la première union d’Adélaïde à l’aune des discours sur la bienfaisance et sur l’économie qu’elle met en jeu. Les cadeaux de noces offerts aux jeunes mariés font aussi l’objet d’une attention particulière; les biens qui circulent entre les personnages contribuent à la polysémie du texte en mettant en exergue une conception des relations humaines fondée sur le respect des normes sociales plutôt que sur la sincérité, ce qui jette le doute sur la promesse de communion sentimentale que représentait le mariage d’amour. Le deuxième chapitre est consacré à la contradiction qui est au coeur des Lettres d’Adélaïde de Dammartin : après avoir connu une première union malheureuse, comparé le mariage à l’esclavage et proclamé son attachement pour la liberté que lui procure son veuvage, l’épistolière se remarie par inclination à la fin du roman, un destin que connaît également son amie madame de Martigues, veuve elle aussi. Une présentation des discours juridiques, religieux et médicaux qui balisaient la liberté des veuves sous l’Ancien Régime permet d’abord de faire ressortir le travail qu’opère Riccoboni sur la figure de la veuve proposée dans l’imaginaire social de l’époque. Ce chapitre montre ensuite que le roman, parce qu’il met en scène des personnages qui prennent systématiquement des décisions allant à l’encontre de leur propre intérêt, est traversé par des questions qui préoccupaient les acteurs de la querelle du libre arbitre qui se déroula en France au XVIIIe siècle à la suite de la diffusion des oeuvres de Benedictus de Spinoza. La réflexion que propose l’oeuvre sur les effets délétères de l’idéologie naturaliste alors émergente, laquelle prêtait aux femmes un comportement naturellement désintéressé, est finalement mise en évidence. L’étude des Lettres d’Adélaïde de Dammartin menée dans ce mémoire restitue le portrait pessimiste de l’institution matrimoniale que dresse un roman paru à une époque où le mariage d’inclination s’offrait pourtant comme une possibilité prometteuse pour l’épanouissement individuel. _____________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : Marie-Jeanne Riccoboni, Lettres d’Adélaïde de Dammartin, mariage, littérature française, Ancien Régime, XVIIIe siècle, roman, droit, économie politique, Spinoza.

Type: Mémoire accepté
Informations complémentaires: Fichier numérique reçu et enrichi en format PDF/A.
Directeur de thèse: Lafrance, Geneviève
Mots-clés ou Sujets: Marie Jeanne Riccoboni / Lettres d’Adélaïde de Dammartin, comtesse de Sancerre, au comte de Nancé, son ami / Mariage dans la littérature / Libre arbitre et déterminisme dans la littérature / Femmes dans la littérature / France (Ancien Régime) dans la littérature
Unité d'appartenance: Faculté des arts > Département d'études littéraires
Déposé par: Service des bibliothèques
Date de dépôt: 08 nov. 2022 12:17
Dernière modification: 08 nov. 2022 12:17
Adresse URL : http://archipel.uqam.ca/id/eprint/16102

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