Les relations transnationales entre le Québec et la Chine populaire (1960-1980) : acteurs, savoirs et représentations

Liu, Yuxi (2019). « Les relations transnationales entre le Québec et la Chine populaire (1960-1980) : acteurs, savoirs et représentations » Thèse. Montréal (Québec, Canada), Université du Québec à Montréal, Doctorat en histoire.

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Résumé

Au lendemain de l'arrivée au pouvoir des communistes en 1949, les relations diplomatiques entre le Canada et la Chine ont été rompues. Ce n'est qu'en 1970 que le gouvernement fédéral canadien a reconnu le régime de Pékin. Toutefois, en dépit de l'absence d'échanges interétatiques durant la période 1949-1970, il y a eu des interactions entre les sociétés canadienne et chinoise. Au Québec, l'intérêt pour la Chine populaire a émergé durant la deuxième moitié des années 1960, et s'est développé au cours de la décennie suivante. Animés par des motivations diverses, un certain nombre d'individus et de groupes se sont donné pour objectif de contribuer à véhiculer une meilleure image de la Chine au sein du peuple canadien et québécois. À travers divers prismes politiques, sociaux et culturels, ils ont appréhendé la Chine à leurs manières. Ils ont ainsi façonné les représentations de ce pays dans les sphères universitaire, politique et sociale du Québec. Les universitaires, notamment en milieu anglophone, ont joué un rôle non négligeable dans la diffusion de l'image de la Chine populaire au Québec, et plus particulièrement à Montréal. Plusieurs professeurs en médecine à l'Université McGill ont effectué un séjour à Pékin dans le cadre du programme d'échange Norman Bethune. À une époque où l'accès au territoire chinois était très limité, les rares personnes qui ont eu l'occasion de s'y rendre bénéficiaient d'une grande crédibilité lorsqu'ils se prononçaient sur des sujets relatifs à ce pays. À ce groupe de précurseurs, s'ajoutaient quelques professeurs en histoire et science politique de la même université qui, regroupés autour du East Asian Studies Centre, ont organisé de nombreuses activités en rapport avec la Chine, et attiré l'intérêt de la communauté étudiante et du grand public. En dehors du milieu universitaire, la Chine a également attiré certains militants souverainistes et socialistes du Québec qui s'intéressaient à divers aspects de l'expérience révolutionnaire, de la lutte au colonialisme et de la construction du socialisme. L'émergence du maoïsme comme force politique au Québec a généré de nouvelles perceptions de la Chine dans la société québécoise à partir de 1971. Dans le mouvement communiste international, l'alliance Chine-Albanie contre l'URSS a créé un dispositif conceptuel servant de référence aux groupes communistes à travers le monde. Ainsi, En Lutte! et la Ligue, les deux plus importants groupes « m-1 » québécois, se sont définis comme « prochinois » dès leur fondation. Les maoïstes québécois cherchaient à obtenir l'appui du Parti communiste chinois, ce qui a eu pour effet de créer une relation de dépendance entre les groupes maoïstes québécois et le PCC. Ces premiers, par le biais de leurs perceptions fort idéalistes de la société chinoise, cherchaient à défendre le modèle politique hérité de la Révolution culturelle afin de justifier l'existence de leurs groupes politiques au Québec et au Canada. Parallèlement, deux groupes d'amitié avec la Chine populaire existaient à Montréal: la Société Canada-Chine et les Amitiés Québec-Chine. Moins politiques que les maoïstes, leurs membres se présentaient comme les « amis » de la Chine. Ainsi, par l'intermédiaire de la Société Canada-Chine, un groupe de la société civile ayant des relations avec les autorités chinoises, canadiennes, québécoises et montréalaises, des perceptions et des connaissances de la Chine ont été diffusées dans certaines couches de la société québécoise. Conscient du rôle des groupes d'amitié dans les relations avec des pays non socialistes, le gouvernement chinois a posé certains gestes concrets pour cultiver, chez ces « amis», une vision sympathique du peuple chinois. Une des stratégies consistait à les inviter en Chine. Les impressions délivrées dans les récits de voyage montrent que la plupart des voyageurs, pas seulement les maoïstes, avaient une vision biaisée de la Chine. Les perceptions des observateurs étrangers par rapport à la réalité chinoise étaient conditionnées par leur conviction politique, mais également par des facteurs culturels et personnels. Ces perceptions reflétaient d'ailleurs la tentative de certains observateurs, notamment de la gauche traditionnelle, des syndicalistes, des féministes et des révolutionnaires de s'inspirer des expériences d'ailleurs pour formuler des revendications politiques et sociales dans leur propre pays. Les groupes d'amitié et les organisations maoïstes ont été confrontés aux difficultés issues des événements qui se sont succédé en Chine après la mort de Mao en 1976. De nombreux changements ont poussé des observateurs à se questionner sur l'orientation politique du pays. Sur· le plan des relations internationales, la Chine populaire a été officiellement reconnue par le gouvernement américain en 1979, événement qui a causé beaucoup de confusions au sein des groupes maoïstes à travers le monde, et donc au Québec. La fin des années 1970 est un moment de désenchantement des maoïstes, mais aussi de la perte progressive de l'importance du travail d'amitié dans les relations du Québec_avec la Chine. Ce déclin peut principalement s'expliquer par deux facteurs: les changements dans la politique étrangère chinoise, et la prise de contrôle de la · Société Canada-Chine par les maoïstes. Le déclin des « amis » de la Chine et des maoïstes coïncide avec le retour au premier plan des acteurs étatiques dans les relations sino-québécoises. Les relations initiées par la société civile ont servi de bases au développement des relations internationales du gouvernement québécois. État non souverain au sein de la fédération canadienne, le Québec ne pouvait pas nouer des relations diplomatiques avec la Chine populaire. Toutefois, la définition de la doctrine de Gérin-Lajoie en 1965 réclamait le prolongement international des pouvoirs constitutionnels de la province en matière d'éducation, de culture et de santé. L'arrivée au pouvoir du Parti québécois en 1976 a eu pour effet d'accentuer la dimension internationale des relations extérieures du Québec. Le ministère des Affaires intergouvernementales du Québec avançait l'idée d'établir des relations bilatérales sino-québécoises «de peuple à peuple», une reformulation des relations internationales qui permettait de contourner le problème constitutionnel. Les échanges dans le domaine de l'éducation et de l'enseignement supérieur ont constitué, à compter de la deuxième moitié des années 1970, le fondement des relations sino-québécoises. La « normalisation » des relations intergouvernementales a notamment marqué le début du développement du tourisme de masse. Avec un nombre croissant de Québécois qui ont pu se rendre en Chine en participant à des voyages organisés par des agences commerciales, s'est produite une dépolitisation des perceptions de ce pays au sein de la société québécoise. _____________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : relations transnationales, perceptions, diplomatie universitaire, maoïsme, travail d'amitié, politique internationale québécoise

Type: Thèse ou essai doctoral accepté
Informations complémentaires: La thèse a été numérisée tel que transmise par l'auteur.
Directeur de thèse: Petitclerc, Martin
Mots-clés ou Sujets: Chine / Québec (Province) / Relations / Opinion publique québécoise / Acteurs non étatiques / Perceptions / Universités / Maoïsme
Unité d'appartenance: Faculté des sciences humaines > Département d'histoire
Déposé par: Service des bibliothèques
Date de dépôt: 03 déc. 2020 10:40
Dernière modification: 03 déc. 2020 10:40
Adresse URL : http://archipel.uqam.ca/id/eprint/13687

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