Gingras, Benjamin
(2018).
« Développement et spécialisation hémisphérique des fonctions intellectuelles : analyse de 2186 cas de lésion corticale unilatérale selon le quotient intellectuel » Thèse.
Montréal (Québec, Canada), Université du Québec à Montréal, Doctorat en psychologie.
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Résumé
Les questions entourant le développement cognitif après une lésion cérébrale focale sont parmi les plus classiques en neuropsychologie, et ont permis l'avancement substantiel des connaissances sur l'organisation et la récupération des fonctions plus avancées. Il est maintenant bien connu que l'âge au moment de la lésion modulera substantiellement la sémiologie clinique et l'étendue des déficits. Plusieurs principes et modèles développementaux ont été élaborés afin de tenter d’expliquer l’apparente robustesse ou vulnérabilité de certaines fonctions suivant une lésion corticale. Le principe de Kennard, voulant qu’une lésion plus précoce prédise une meilleure récupération qu’une lésion plus tardive pour certaines fonctions, dont la motricité, a récemment été investiguée et sérieusement remise en question en ce qui concerne le QI (Duval et al., 2007 ; Montour-Proulx et al., 2004). D’autres modèles, suggérant que la modulation des patrons de robustesse et de vulnérabilité passe par des modifications dans le partage du traitement de l’information entre les deux hémisphères (Lenneberg, 1967 ; Teuber, 1967 ; 1974 ; Rasmussen & Milner, 1977), ont également retenu l’attention des chercheurs. Bien que plusieurs tentatives aient été faites pour tenter de vérifier l’existence des effets soutenus par ces modèles, les études cliniques ont toutes été limitées par plusieurs facteurs, dont de petits échantillons comportant d’un à deux groupes d’âge arbitraires, ainsi qu’un faible contrôle sur les variables neurologiques confondantes (volume de la lésion, présence d’épilepsie, étiologie, etc.). Au-delà de l’importance qu’ont ces questions pour la prise en charge clinique et pour informer le pronostic, l’étude des facteurs modulant la récupération intellectuelle post-lésionnelle ainsi que le déploiement de la spécialisation hémisphérique au fil des années permet de jeter un regard sur des patrons neurodéveloppementaux fondamentaux. Afin de pallier les limites des études précédentes, nous avons fait appel à un échantillon de 2186 cas individuels ayant subi une lésion cérébrale unilatérale, en documentant pour les facteurs neurologiques et biographiques et rapportant les scores de QIV et de QIP. Ainsi, deux articles ont été rédigés et publiés afin de réexaminer des questions entourant le développement et l’implantation de la spécialisation hémisphérique ainsi que du développement intellectuel suite à une lésion cérébrale. Le premier, examinant le déploiement de la spécialisation hémisphérique sur l’empan de la vie, a permis d’observer que celle-ci progresse jusqu’en sénescence, et est soutenue par un gradient développemental entre les lobes temporaux touchant le QIV, et les lobes pariétaux touchant le QIP. Le second, examinant le rôle de l’épilepsie dans la récupération post-lésionnelle, a découvert que ce facteur neurologique agit comme médiateur du parcours de récupération, où la présence d’épilepsie entraîne un effet anti-Kennard tant pour le QIV que le QIP, alors qu’un effet Kennard est observé pour le QIP sans la présence d’épilepsie. Ensemble, nos résultats permettent de constater que le développement intellectuel, la récupération post-lésionnelle, et la spécialisation hémisphérique des fonctions associées à l’intelligence sont plus dynamiques et complexes que ce qui a été rapporté précédemment. Les modèles neurodéveloppementaux doivent considérer les facteurs neurologiques : présence ou non d’épilepsie, le site lobaire, le côté, ainsi que l’âge à la lésion. Nos résultats nous permettent également de constater que la spécialisation hémisphérique existe chez l’humain davantage en tant que processus qu’en tant que trait, dans la mesure que celle-ci est en mouvance constante et n’est pas « fixée » dans le temps. Une certaine spécialisation hémisphérique semble exister avant même la naissance, devenant fonctionnellement différenciée à la petite enfance, et continuant à se déployer tout au long de la vie. Nous avançons l’hypothèse que l’implantation plus tardive des fonctions langagières dans l’hémisphère gauche ainsi que l’organisation apparemment prénatale des fonctions visuospatiales, telle que manifestée par des lésions corticales unilatérales congénitales, soient le résultat d’un programme épigénétique différencié. Les fonctions visuospatiales sont beaucoup plus anciennes dans l’histoire phylogénétique, et sont cruciales dès la naissance. L’intelligence verbale, phylogénétiquement beaucoup plus récente, ne se consolide que plus tard dans le développement, son implantation dans l’hémisphère gauche s’opérant principalement après la naissance. Finalement, nous arguons que la robustesse de l’intelligence verbale suivant une lésion de l’hémisphère gauche reflète l’importance cruciale des fonctions langagières dans le fonctionnement social de l’être humain.
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MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : lésion cérébrale, intelligence, développement, épilepsie, spécialisation hémisphérique, récupération, âge
Type: |
Thèse ou essai doctoral accepté
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Informations complémentaires: |
La thèse a été numérisée telle que transmise par l'auteur. |
Directeur de thèse: |
Braun, Claude |
Mots-clés ou Sujets: |
Lésions cérébrales / Quotient intellectuel / Cognition / Facteurs liés à l'âge / Réadaptation / Dominance cérébrale / Épilepsie |
Unité d'appartenance: |
Faculté des sciences humaines > Département de psychologie |
Déposé par: |
Service des bibliothèques
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Date de dépôt: |
07 mars 2019 09:53 |
Dernière modification: |
07 mars 2019 09:53 |
Adresse URL : |
http://archipel.uqam.ca/id/eprint/12318 |