A la memoria de Celso Furtado (1920-2004)

Guillén, Arturo (2004). « A la memoria de Celso Furtado (1920-2004) ». Chroniques des Amériques, 4.

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Résumé

Celso Furtado, célèbre économiste et auteur brésilien qui a eu une influence déterminante sur la théorie du développement, ainsi que sur les modèles de développement appliqués en Amérique latine au cours du précédent demi-siècle, est mort à Rio de Janeiro, le 20 novembre 2004. Né le 20 juillet 1920, à Pombal dans l’État de Paraiba dans le nord-est du pays, il a d’abord fait des études en droit à l’Université fédérale de Rio de Janeiro. En 1944, il s’enrôle dans les forces armées brésiliennes qui combattent aux côtés des Alliés durant la Deuxième Guerre mondiale. Démobilisé, il suit des cours d’économie à la Sorbonne et il obtient son doctorat sous la direction d’études de Maurice Byé en 1948. Au cours de sa longue carrière, il a publié plus de 30 livres, dont plusieurs ont été traduits en français. Parmi les titres les plus connus, on peut retenir les suivants: Politique économique de l’Amérique latine (traduction française, 1970); Les États-Unis et le sous-développement en Amérique latine (1970); La formation économique du Brésil (1972); La théorie du développement économique (1976); Créativité et dépendance (1984); Le mythe du développement économique (1984); Le Brésil après le miracle économique (1987) et Brève introduction au développement (1989). Ces dernières années, il avait publié une autobiographie en trois volumes. Son dernier livre paru portait le titre espagnol suivant: En busca de un nuevo modelo, reflexiones sobre la crisis contemporánea (2002). Celso Furtado avait assumé plusieurs fonctions et charges importantes au cours de sa carrière. Il a d’abord été directeur d’un organisme fédéral de développement du nord-est du Brésil durant l’administration de Juscelino Kubitschek (1956-1960), puis ministre de la Planification sous le gouvernement progressiste de Joao Goulart, en 1961-1964, jusqu’au coup d’État perpétré par les militaires qui le contraint à l’exil Durant son exil, il a enseigné successivement à Paris, à Yale, à Cambridge et à Harvard. De retour au pays, il est nommé ambassadeur auprès de l’Union européenne (1985-86), plus tard, ministre de la Culture, sous le gouvernement de transition de José Sarney. Raul Prebisch et Celso Furtado furent sans conteste les deux économistes latino-américains les plus influents du XXième siècle, non seulement parce qu’ils furent les fondateurs d’un courant théorique majeur, le structuralisme économique dans sa version latino-américaine, un courant qui occupe une place centrale dans la théorie du développement économique, mais surtout parce que leurs idées à tous deux ont eu un impact déterminant sur les stratégies économiques défendues aussi bien par la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes de l’ONU (CEPALC), depuis sa fondation en 1948 jusqu’aux années quatre-vingt, que par les gouvernements d’Amérique latine durant l’Après-guerre, période au cours de laquelle plusieurs de ces pays ont connu à certains moments une remarquable performance économique et sociale. Contrairement aux énoncés issus de la théorie classique aux yeux de laquelle tout échange fondé sur une dotation préalable en ressources matérielles et humaines favorise les deux partenaires à proportion des coûts engagés dans leur production respective, en vertu de la théorie du structuralisme économique proposée par Prebisch, les termes des échanges entre pays producteurs de produits de base ou primaires et pays producteurs de produits manufacturés favorisent systématiquement et nécessairement les seconds aux dépens des premiers, à raison du plus haut niveau de technologie et de savoir incorporés dans la production de produits manufacturés par comparaison à ceux qui sont incorporés dans les produits primaires. La contribution de Furtado, aux dires mêmes de Prebisch, a été déterminante parce qu’elle a fourni à la théorie les assises historiques qui lui faisaient défaut. C’est d’ailleurs sur ces bases à la fois théorique et historique qu’ont pu être avancés et proposés les programmes ultérieurs d’industrialisation de l’Amérique latine défendus par la CEPALC, à l’intérieur de laquelle les deux économistes devaient jouer un rôle important et soutenu depuis sa fondation en 1948. Dans sa lettre d’appui à la candidature de Celso Furtado au prix Nobel d’économie, Theotonio Dos Santos rappelait l’influence qu’avait exercés l’École des Annales et Fernand Braudel sur sa pensée, un jugement partagé par André Gunder Franck dans un article paru en 2004. L’apport de Celso Furtado à la théorie de la dépendance et à la relation entre centre et périphérie a contribué à mettre en lumière à quel point le développement est et demeure un projet national qui doit être porté et défendu par un gouvernemnt national. En ce sens, Furtado a été un penseur et un homme de terrain, sans être l’homme d’un parti.

Type: Article de revue scientifique
Mots-clés ou Sujets: Celso Furtado
Unité d'appartenance: Centres institutionnels > Centre d'études sur l’intégration et la mondialisation
Déposé par: Julian Durazo-Herrmann
Date de dépôt: 18 sept. 2017 07:31
Dernière modification: 12 avr. 2018 12:30
Adresse URL : http://archipel.uqam.ca/id/eprint/10222

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